Cette rencontre avec Sandra Lucbert sera l'occasion d'explorer ce que peut une littérature politique : chemin littéraire singulier que celui que Sandra Lucbert déploie et qui se donne pour tâche de montrer par les moyens de la littérature comment le capitalisme néolibéral nous entre dans la langue tout autant que dans le corps.
Formée en Lettres modernes et en psychanalyse, Sandra Lucbert poursuit, en effet, de texte en texte sa dissection littéraire de l'hégémonie culturelle du capitalisme financiarisé, en faisant l'anatomie de sa langue comme de ses figures. Après La Toile (Gallimard, 2017), qui prenait la forme d'un roman où elle explorait les effets du numérique massifié et le régime de pulsionnalité qui lui est propre, elle s'arrache à la forme romanesque en publiant Personne ne sort les fusils (Seuil, 2020), avec pour point de départ le procès France Télécom. Le texte prend alors la forme d'une machine exploratoire des effets de la Lingua Capitalismi Neoliberalis (LCN), le langage du capitalisme néolibéral. Elle poursuit ce travail avec Le Ministère des contes publics (Verdier) en 2021 qui défait l'un après l'autre les imaginaires de LaDettePubliqueC'estMal et les contes qui sous-tendent les logiques de destruction des services publics. Elle ressaisit l'ensemble de son geste dans Défaire Voir (Amsterdam) en 2024, pratique et théorie d'une littérature politique. En 2025, sort Pulsion qu'elle co-signe avec Frédéric Lordon, refonte de l'appareil conceptuel de la psychanalyse pour la dégager de ses biais patriarcaux, coloniaux et pathologisant, manière de redisposer les concepts et de saisir l'efficace des propositions pulsionnelles faites par le fascisme et le capitalisme, préalable indispensable si l'on veut pouvoir leur résister.
Cette rencontre est pensée en dialogue avec la programmation de Je s'ingénie un genre à la Scène nationale d'Albi le 15 novembre dans le cadre du temps fort "More Poetry is needed" organisé par le centre d'art Le Lait.
